Vers une conception rationnelle de nouveaux adjuvants

Résultats scientifiques

La vaccination permet de prévenir et d’éliminer les maladies infectieuses, évitant, d’après l’Organisation Mondiale de la Santé, deux à trois millions de morts par an. Cependant afin d’augmenter son efficacité, il est nécessaire de développer des adjuvants qui accroissent la réponse immunitaire induite par les antigènes. Des chercheurs de l’Institut de pharmacologie et de biologie structurale, montrent qu’il est possible de concevoir une nouvelle génération d’adjuvants de façon rationnelle. Cette étude a été publiée le 21 février 2017 dans la revue PNAS.

Les vaccins sont principalement utilisés comme moyen de lutte contre les maladies infectieuses mais ils peuvent aussi être utilisés dans le cadre d’immunothérapies contre le cancer. Historiquement, les vaccins étaient composés d’agents pathogènes atténués, ou tués, mais ils peuvent générer des effets secondaires indésirables importants. Actuellement, la recherche se porte sur les vaccins sous-unitaires qui induisent une réponse mieux définie et plus sure contre des antigènes bien caractérisés et qui peuvent cibler soit des antigènes bactériens ou viraux soit des antigènes associés aux tumeurs.

 

Cependant, la réponse immunitaire contre ces antigènes est souvent faible et il est nécessaire de développer des adjuvants afin d’augmenter et d’orienter la réponse immunitaire induite par la vaccination. Les adjuvants majoritairement utilisés chez l’homme, tels que les adjuvants à base d’aluminium induisent une réponse lymphocytaire T de type Th2, qui cible efficacement les pathogènes extracellulaires mais est inefficace contre les pathogènes intracellulaires. Il est donc nécessaire de développer des adjuvants induisant une réponse cellulaire de type Th1 efficace contre des pathogènes intracellulaires comme le VIH, le virus de la grippe, Mycobacterium tuberculosis, mais également contre les cellules cancéreuses.

 

Pendant très longtemps, le développement d’adjuvants s’est fait de façon empirique. Récemment, la lectine de type C Mincle a été identifiée comme un récepteur conduisant au développement de réponses Th1, et Th17, via la reconnaissance de glycolipides microbiens, ouvrant ainsi la voie à la conception rationnelle de nouveaux adjuvants.

 

Au cours de cette étude, les chercheurs 1  ont utilisé une approche pluridisciplinaire combinant synthèse chimique, biologie cellulaire et bio-informatique afin de mieux décrypter les mécanismes moléculaires de reconnaissance des ligands de type glycolipidique par le récepteur. Ces données ont permis la conception rationnelle et la synthèse de nouveaux ligands spécifiques de Mincle, qui induisent une réponse immunitaire supérieure à celle des ligands actuellement disponibles, tout en étant beaucoup moins toxiques, et qui représentent donc de nouveaux candidats adjuvants.

 

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Figure : Conception rationnelle de nouveaux adjuvants, ligands de la lectine de type C Mincle. La lectine de type C Mincle, associée au récepteur FcRγ, est couplée à une voie de signalisation conduisant à l’activation du facteur de transcription NF-κB et à la production de cytokines pro-inflammatoires, et, in fine, à la mise en place de réponses immunes à médiation cellulaire de types Th1 et Th17. Mincle reconnait un glycolipide de l’enveloppe de la bactérie pathogène Mycobacterium tuberculosis, le dimycolate de tréhalose (TDM), qui présente des propriétés adjuvantes mais s’avère toxique en raison de la présence d’acides gras à longues chaines carbonées (jusqu’à 90 atomes de carbone). Les chercheurs ont décrypté les mécanismes moléculaires de la reconnaissance des ligands glycolipidiques par Mincle, puis, sur cette base, conçu et produit de nouvelles molécules adjuvantes aux propriétés améliorées, en particulier la molécule dénommée GlcC14C18.

© Jérôme Nigou

 

 

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  • 1Ces travaux ont été réalisés en collaboration avec la société InvivoGen et le Laboratoire d'Ingénierie des Systèmes Biologiques et des Procédés