Un traitement contre la cardiomyopathie associée à la dystrophie musculaire de Duchenne

Résultats scientifiques Biologie cellulaire

La dystrophie musculaire de Duchenne (DMD) est associée à une cardiomyopathie. Les scientifiques montrent que la dysfonction cardiaque est due à un dérèglement précoce de la régulation du calcium intracellulaire et que l’on peut retarder la progression de la dysfonction cardiaque par un stabilisateur du canal de libération du calcium (Rycal).  Ces résultats sont publiés dans la revue Journal of the American College of Cardiology.

Les sujets atteints de DMD, présentent très précocement une faiblesse musculaire, des déformations squelettiques, une perte de la marche autonome à l'âge de 10 ans, une insuffisance respiratoire à l'âge de 20 ans. La meilleure prise en charge clinique au cours des dernières décennies a permis d’allonger l’espérance de vie qui est maintenant fortement affectée par l’émergence d'une insuffisance cardiaque. Le pronostic de la DMD est donc maintenant fortement lié à un dysfonctionnement cardiaque, qui survient généralement dans la deuxième décennie. Cependant, pendant l'enfance, les signes cliniques classiques de l'insuffisance cardiaque ne sont pas présents et la gravité de la dysfonction cardiaque n'est pas proportionnelle à celle de la faiblesse des muscles squelettiques.

L'étude des interactions entre la régulation de l'homéostasie du calcium intracellulaire et de la fonction cardiaque constitue un domaine de recherche très exploratoire qui a permis aux scientifiques de mettre en évidence et comprendre les altérations contractiles cardiaques précoces, dont l’importance clinique émerge. Les chercheurs avaient récemment montré des atteintes précoces et évolutives de la fonction cardiaque chez des enfants atteints de DMD par des analyses échocardiographiques à haute résolution. Une dysfonction cardiaque pré-symptomatique est retrouvée chez 25 % des patients de moins de 6 ans. La cardiomyopathie est cliniquement évidente pour la première fois après 10 ans. Son incidence augmente avec l'âge, elle est présente chez tous les patients de plus de 18 ans. Il n'existe actuellement aucun traitement efficace contre la DMD ; les thérapeutiques utilisées à ce jour visent à réduire les signes cliniques de la maladie dans le cœur.

Les scientifiques mettent en évidence, par une étude prospective préclinique chez des chiens atteints de DMD, que ce dysfonctionnement cardiaque précoce causé par une dérégulation de l'homéostasie du calcium, peut être retardé par l'administration chronique de l'ARM036. Cette petite molécule appartient à la famille des Rycal®, développées pour stabiliser la fonction des récepteurs de la ryanodine, canaux calciques qui régulent l'homéostasie calcique intracellulaire de nombreux types cellulaires. L’étude montre que l'administration chronique précoce d'ARM036 retarde la progression du dysfonctionnement du ventricule gauche et que l'efficacité du traitement serait donc dépendante de la fenêtre thérapeutique.

Des investigations chez les patients atteints de DMD sont maintenant nécessaires pour déterminer si l'administration de Rycal permettrait de réduire ou de retarder le développement de la cardiomyopathie dilatées et l'insuffisance cardiaque.

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© Alain Lacampagne & Olivier Cazorla
Figure : Ce travail est une étude prospective préclinique utilisant un grand modèle animal de la dystrophie musculaire de Duchenne (DMD) qui a identifié un phénotype de dysfonctionnement cardiaque précoce causé par une régulation anormale du calcium intracellulaire. Cette dérégulation est empêchée par l'administration chronique de l'ARM036, une petite molécule qui stabilise le canal calcique du réticulum sarcoplasmique ou récepteur de la ryanodine.

Pour en savoir plus :
Stabilizing Ryanodine Receptors Improves Left Ventricular Function in Juvenile Dogs With Duchenne Muscular Dystrophy
Olivier Cazorla, Inès Barthélémy, Jin Bo Su, Albano C. Meli, Valérie Chetboul, Valérie Scheuermann, Vassiliky Gouni, Camille Anglerot, Sylvain Richard, Stéphane Blot, Bijan Ghaleh, Alain Lacampagne.
Journal of the American College of Cardiology 7 décembre  2021 .
doi:10.1016/j.jacc.2021.10.014

Contact

Alain Lacampagne
Chercheur CNRS au Laboratoire de physiologie et médecine expérimentale du coeur et des msucles (CNRS/Inserm/Université de Montpellier)

laboratoire

Physiologie et médecine expérimentale du cœur et des muscles (PhyMedExp),(CNRS,Inserm, Université de Montpellier)
CHU Arnaud de Villeneuve
34295 Montpellier CEDEX5