Un fil rouge entre stress et anxiété : la voie VTA-amygdale

Résultats scientifiques Neuroscience, cognition

L’anxiété se caractérise par une hyperactivité d’une région du cerveau : l’amygdale. Mais les mécanismes sous-jacents sont mal compris. Dans une étude publiée dans Biological Psychiatry, des scientifiques révèlent, chez la souris, un nouveau mécanisme synaptique par lequel le stress chronique reconfigure les circuits de l’anxiété. Cette étude offre des perspectives prometteuses pour mieux comprendre et traiter les troubles anxieux.

L’anxiété et son impact sur la santé mentale

L’anxiété est une réponse naturelle de l’organisme qui favorise la vigilance et la prudence face au danger. Toutefois, lorsqu’elle devient excessive ou mal régulée, elle peut évoluer en trouble anxieux, affectant durablement la santé mentale. Ces troubles sont parmi les plus fréquents, apparaissant souvent tôt dans la vie et tendent à persister. L’amygdale, une structure clé du cerveau émotionnel, joue un rôle central dans la détection des menaces et l’activation de réponses adaptées. Dans des conditions normales, l’activité de l’amygdale est finement régulée par un équilibre entre les signaux excitateurs et inhibiteurs. La rupture de cet équilibre peut entraîner une hyperactivation de l’amygdale, provoquant des réactions émotionnelles intenses et une anxiété accrue. Le stress chronique, en particulier, est connu pour modifier la structure et la fonction des neurones amygdaliens, les rendant plus excitables.

Découverte d’un nouveau mécanisme synaptique

Dans cette étude publiée dans la revue Biological Psychiatry, des scientifiques ont utilisé le modèle murin. À l’aide de techniques de pointe telles que l’optogénétique, qui utilise la lumière pour contrôler l’activité des neurones, l’électrophysiologie, qui mesure l’activité électrique des neurones et la microscopie, ils ont mis en évidence un circuit jusque-là peu exploré : une projection excitatrice provenant des neurones glutamatergiques de l’aire tegmentale ventrale (VTA) vers l’amygdale basolatérale (BLA). Ce circuit s’active rapidement en réponse au stress social et son activité devient exagérée en cas d’exposition chronique.

Fait marquant : seules ces projections, et non celles en provenance du cortex préfrontal, étaient durablement potentialisées par le stress chronique. Leur activation induisait une hyperexcitabilité des neurones de la BLA, accompagnée de comportements anxieux. L’activation optogénétique ciblée de ce circuit a reproduit les effets du stress, tandis que son inhibition les prévenait.

Sur le plan moléculaire, les auteurs ont montré que l’anxiété induite par le stress repose sur l’insertion de récepteurs AMPA contenant la sous-unité GluA1 dans les neurones de la BLA. En bloquant cette insertion grâce à une approche virale, une méthode qui permet de modifier l’expression de gènes cibles, ils ont réussi à prévenir l’hyperactivité de l’amygdale et les comportements anxieux.

En révélant un nouveau mécanisme synaptique par lequel le stress chronique reconfigure les circuits de l’anxiété, cette étude ouvre des perspectives prometteuses pour mieux comprendre et traiter les troubles anxieux.

© Sebastian P Fernandez

Figure 

  • Image du haut : Cette image montre des enregistrements de l'activité cérébrale dans l'amygdale, une région impliquée dans le contrôle de l’anxiété. En situation de stress, certains neurones de l’amygdale présentent une activité accrue. Les tracés situés à droite illustrent cette activité, mesurée par la probabilité d’émission de signaux électriques par les neurones.
  • Image du bas : Cette image illustre une méthode de délivrance ciblée d’un outil génétique visant spécifiquement les neurones liés à l’anxiété dans l’amygdale de la souris. Cette stratégie permet d’étudier les mécanismes cellulaires associés à l’augmentation de l’anxiété, ainsi que de réduire l’activité de ces neurones pour atténuer les comportements anxieux chez la souris

En savoir plus : Contesse T, Gomes-Ribeiro J, Royon L, Fofo H, Braine A, Glangetas C, Zhang S, Barbano MF, Soiza-Reilly M, Georges F, Barik J, Fernandez SP. Social stress increases anxiety by GluA1-dependent synaptic strengthening of ventral tegmental area inputs to the basolateral amygdala. Biol Psychiatry. 2025 Apr 15:S0006-3223(25)01121-7. doi: 10.1016/j.biopsych.2025.04.007. Epub ahead of print. PMID: 40245975.

Contact

Sebastian Pablo FERNANDEZ
Chercheur CNRS

Laboratoire

Institut de Pharmacologie Moléculaire et Cellulaire - IPMC (CNRS/Université Côte d'Azur)
660 route des Lucioles Sophia Antipolis
06560 Valbonne