Transmettre la pathologie Alzheimer pour comprendre l'origine des atteintes cognitives

Résultats scientifiques Neuroscience, cognition

La maladie d’Alzheimer est caractérisée par l’accumulation cérébrale de protéines tau anormales, et par une perte synaptique à l'origine des troubles cognitifs. Dans un article publié dans la revue Acta Neuropathologica Communications, les scientifiques démontrent que la pathologie tau peut être transmise expérimentalement, diffuser dans le cerveau et est directement associée à une atteinte synaptique. Ces travaux décrivent la cascade d'événements associés à la transmission de la pathologie Alzheimer.

La maladie d'Alzheimer touche environ un million de personnes en France. Elle est caractérisée par une pathologie tau intracellulaire (accumulation anormale de cette protéine tau) qui se propage dans le cerveau, par une accumulation extracellulaire de protéines amyloïde-β (Aβ) et par une perte synaptique à l'origine des troubles cognitifs. La cascade d'événements liant ces altérations fait encore débat.

En étudiant des souris modifiées génétiquement pour produire des lésions Aβ mais pas de lésions tau, les scientifiques ont montré que des dépôts Aβ peuvent induire des lésions tau dans leur environnement proche. Ils ont également montré que l'infusion intracérébrale d'extraits de cerveaux issus de patients Alzheimer induit les effets suivants : i) une perte de mémoire, ii) une augmentation de la charge Aβ au site d'inoculation, iii) l'apparition de nouvelles lésions tau à côté du site d'inoculation puis une propagation de ces lésions dans les zones connectées. La possibilité d'induire une pathologie tau chez des souris à partir de cerveaux humains suggère que la pathologie tau est transmissible d'une espèce à l'autre. iv) Enfin, l'infusion intracérébrale d'extraits de cerveaux Alzheimer réduit la densité synaptique. Les déficits synaptiques sont corrélés à une sévérité accrue de lésions tau proche des lésions amyloïdes (plaques neuritiques) mais pas à d'autres lésions tau (à distance des lésions amyloïdes) ou Aβ, ce qui suggère que les plaques neuritiques sont responsables de la perte synaptique.

Cette étude souligne que la pathologie tau est transmissible, y compris d'une espèce à l'autre. Une fois transmise, la pathologie peut se propager pour coloniser l'ensemble du cerveau et peut induire des atteintes synaptiques. Ces mécanismes ont probablement un rôle important dans la cascade d'événements associés à la maladie d'Alzheimer.

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© Marc Dhenain

Figure : L'inoculation intracérébrale d'extraits de cerveaux de patients atteints de la maladie d’Alzheimer à des souris induit des lésions microscopiques typiques de la maladie d'Alzheimer (amylose et tauopathie) et la diffusion de ces lésions depuis le point focal d'inoculation vers l'ensemble du cerveau. La pathologie tau est transmissible d'une espèce à l'autre. Ces altérations sont associées à l'apparition d'atteintes synaptiques et de troubles cognitifs.

Pour en savoir plus:
Pathological changes induced by Alzheimer's brain inoculation in amyloid-beta plaque-bearing mice.
Lam S, Herard AS, Boluda S, Petit F, Eddarkaoui S, Cambon K, The Brainbank Neuro-CEB Neuropathology Network, Picq JL, Buee L, Duyckaerts C, Haik S, Dhenain M
Acta Neuropathologica Communications. 16 aout 2022: https://doi.org/10.1186/s40478-022-01410-y

Contact

Marc Dhenain
Directeur de recherche CNRS

Laboratoire

Laboratoire des maladies neurodégénératives - MIRCen (Université Paris Saclay/CEA/CNRS)
18 route du Panorama
92265 Fontenay aux Roses