Migration cellulaire: adaptation à la géométrie de l'environnement

Résultats scientifiques Microbiologie

La migration cellulaire s’effectue dans des environnements aux caractéristiques physiques et chimiques hétérogènes. Cette étude montre que les cellules adaptent leur forme, leur architecture interne et ainsi leurs modes de migration aux changements de courbure de l’environnement, ce qui leur permet de naviguer dans ces environnements complexes.

La migration cellulaire est un mécanisme primordial qui assure des fonctions essentielles telles que la mise en place des tissus et des organes au cours du développement ou encore la cicatrisation des tissus endommagés. Elle est également impliquée dans des processus pathologiques comme la dissémination des cellules tumorales. Le cytosquelette cellulaire, notamment composé d’actine, joue un rôle primordial dans la migration cellulaire en adaptant notamment la forme des cellules aux environnements complexes dans lesquels elles doivent se mouvoir. Il est bien connu que les cellules développent en leur front un lamellipode, c'est-à-dire une extension du corps cellulaire faite de filaments d’actine, qui se lie au support et oriente la direction de migration. En migrant, les cellules changent constamment de forme.

En utilisant des substrats microfabriqués aux géométries contrôlées, les chercheurs ont pu mettre en évidence un nouveau mode de migration cellulaire: un « lamellipode inversé » qui régule et répond à la courbure de la membrane cellulaire. Les courbures de la membrane cellulaire induisent des changements de forme des cellules qui s’adaptent aux propriétés topographiques de l’environnement. Ce lamellipode inversé présente une organisation et une dynamique du cytosquelette d’actine exactement opposées à celles classiquement observées chez le "lamellipode classique". Alors que ce dernier se localise dans des zones de courbure positive en poussant la membrane cellulaire vers l’avant, cette nouvelle structure correspond aux régions de courbure négative. Sous l’effet de la tension générée dans ces zones de courbures négatives, le cytosquelette d’actine s’organise en câbles contractiles qui s’écoulent vers le front cellulaire.

Cette adaptation dynamique permet ainsi aux cellules de naviguer dans des matrices aux topographies variées qu’elles rencontrent tout en maintenant la direction de leur mouvement. L’importance de ce mécanisme réside aussi dans le fait qu’il s’observe aussi bien dans la migration de cellules isolées à une échelle subcellulaire que dans la migration collective de cellules épithéliales, lors de la cicatrisation par exemple, mais cette fois à une échelle multicellulaire. Ce travail pluridisciplinaire montre que le cytosquelette cellulaire est un senseur de la forme cellulaire et que sa versatilité permet aux cellules de modifier efficacement leurs modes de migration en fonction des conditions d’adhésion rencontrées lors de leur déplacement.

 

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Figure : Migration d'un groupe de cellules lors de la fermeture d’un "trou" formé dans un épithélium cellulaire présentant diverses formes cellulaires et diverses organisations du cytosquelette d’actine en fonction de la courbure du trou. Le cytosquelette d’actine apparait en rouge et le noyau des cellules en bleu.

© Tianchi Chen & Benoit Ladoux

 

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Contact

Benoit Ladoux
Chercheur CNRS à l'Institut Jacques Monod (CNRS / Université de Paris)