Microbiote : optimiser sa composition pour une meilleure protection contre les pathogènes

Résultats scientifiques Microbiologie

Le microbiote intestinal offre une barrière naturelle contre les bactéries pathogènes. Dans une étude publiée dans la revue Science les scientifiques démontrent que le mécanisme de cette résistance implique principalement le blocage par un ensemble d’espèces présentes dans la microbiote des nutriments nécessaires aux bactéries pathogènes.

Pour étudier le microbiote, les scientifiques se sont positionnés dans l’observation de cet écosystème complexe au sein de notre organisme. Ici, ils ont étudié l’écologie des bactéries pour comprendre le rôle de protection de celles bénéfiques pour le microbiote humain contre deux pathogènes bactériens importants, Klebsiella pneumoniae et Salmonella enterica serovar Typhimurium.

La diversité des bactéries symbiotiques avec l’organisme est cruciale pour sa résistance aux pathogènes. Dans cette étude, les scientifiques ont réalisé des tests in vitro et in vivo sur des souris gnotobiotiques (souris dépourvus de microbiotes) afin de déterminer les facteurs essentiels à cette résistance. Cette dernière a été examinée individuellement, c’est-à-dire en examinant la réponse individuelles des symbiotes aux deux pathogènes. Ils ont ainsi pu les classer en un podium en fonction de leur capacité à conférer une résistance. Plus de 100 symbiotes ont ainsi été étudiés. Il ressort de cette première étude que même les espèces les plus performantes offraient une protection limitée contre les pathogènes. En revanche, lorsque les symbiotes étaient regroupées en communautés diverses comprenant jusqu'à 50 espèces, la résistance aux pathogènes n’en était que plus efficace. En conséquence, la diversité écologique est apparue comme un facteur crucial pour la résistance à la colonisation,

Certaines espèces clefs nécessaires mais pas suffisantes

Malgré leur capacité protectrice individuelle limitée, la présence d’espèces clefs est nécessaire à la résistance, aussi bien in vitro qu’in vivo. Les scientifiques ont montré que l’inclusion d’une espèce clef étroitement liée au pathogène est cruciale pour conférer une protection. Mais sa présence seule est insuffisante. En effet, d’autres espèces, souvent éloignées sur le plan phylogénétique, sont nécessaires. Cette résistance à la colonisation a été expliqué par la capacité des communautés de symbiote à entraver la croissance des pathogènes en consommant leurs nutriments essentiels.

Affamer les pathogènes pour les empêcher de nuire

En se basant sur ces résultats, des prédictions ont été faites in silico contre une nouvelle souche cible, un isolat clinique d'Escherichia coli résistant aux antimicrobiens afin de déterminer les meilleurs combinaisons possibles. Les tests expérimentaux réalisés suite à ces prédictions ont confirmé l'identification de communautés protectrices parmi un grand nombre de combinaisons possibles.

Ces résultats étayent l'idée que des microbiomes plus diversifiés peuvent procurer des avantages pour la santé, en particulier en renforçant la protection contre la colonisation par des pathogènes. De plus, la résistance à la colonisation émerge comme une propriété collective des communautés microbiennes, soulignant que la capacité protectrice d'une seule souche dépend de sa combinaison avec d'autres. Bien que la diversité accrue du microbiome augmente la probabilité de protection contre les pathogènes, le facteur décisif réside dans le recouvrement des profils d'utilisation des nutriments entre la communauté et le pathogène. Ce travail propose une voie pour optimiser la composition des microbiomes afin d'améliorer la protection contre les pathogènes.

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© Frances Spragge and Erik Bakkeren

Pour en savoir plus :
Microbiome diversity protects against pathogens by nutrient blocking
Spragge, Frances, Erik Bakkeren, Martin T. Jahn, Elizete B N Araujo, Claire F. Pearson, Xuedan Wang, Louise Pankhurst, Olivier Cunrath, and Kevin R. Foster. “Microbiome Diversity Protects against Pathogens by Nutrient Blocking.”
Science, 15 Decembre 2023, DOI: https://doi.org/10.1126/science.adj3502

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Olivier Cunrath
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