L’évolution de notre cerveau décryptée !

Résultats scientifiques

Comment les différentes régions de notre cerveau ont-elles évoluées au cours du temps ? Pour la première fois, une étude conduite par Michel Thiebaut de Schotten à l’Institut du cerveau et de la moelle épinière, montre que les aires du cerveau les plus variables anatomiquement sont celles qui se sont développées le plus récemment dans l’évolution. Inversement, plus les structures du cerveau sont anciennes, plus elles sont stables. Ainsi l’évolution de notre cerveau fonctionne comme les strates géologiques qui se figent avec le temps. Cette étude a été publiée le 13 octobre 2017 dans la revue Cerebral Cortex.

Grâce à l’imagerie cérébrale, des chercheurs de l’Institut du cerveau et de la moelle épinière, du Friedman Brain Institute à New-York et du King’s College à Londres, ont exploré la variabilité, intra-espèce et inter-espèces, des cerveaux humains et simiens. Cette variabilité correspond aux différences de structure observables d’un cerveau à un autre.


Ils ont montré que certaines zones du cerveau sont plus variables que d’autres, c’est-à-dire qu’elles présentent des différences de structure entre les individus. Cette distribution des régions très variables est très comparable entre le singe et l’homme, même si elles sont moins visibles chez le singe, son cerveau étant plus petit.


Afin de comprendre comment ces régions variables sont distribuées dans le cerveau, les chercheurs ont comparé les cartes de variabilité établies avec des cartes estimées de l’expansion des régions cérébrales sur l’arbre de l’évolution, développées à la Washington & St Louis University par David Van Essen.


Les scientifiques montrent ainsi, pour la première fois, que les aires les plus variables anatomiquement sont les mêmes aires qui se sont développées le plus tardivement sur l’arbre de l’évolution, alors que les aires les plus stables sont aussi les plus anciennes d’un point de vue évolutif. L’évolution du cerveau pourrait être schématisée comme la sédimentation en géologie ou comme la croissance d’un arbre. Le centre du tronc, la partie la plus ancienne de l’arbre, est très dure et immuable, puis les couches s’ajoutent jusqu’à l’écorce qui, elle, est friable et facile à changer.


Les régions identifiées comme très variables semblent correspondre aux fonctions cognitives supérieures, comme la conscience, le langage, la créativité.... Chez l’homme, la variabilité est très présente au niveau des aires du langage, plutôt dans l’hémisphère gauche, alors que chez le singe, la variabilité est localisée dans les aires de l’orientation dans l’espace, plutôt dans l’hémisphère droit. 
Les chercheurs ont également montré que le degré de variabilité est plus élevé chez l’homme que chez le singe au niveau de certaines régions spécifiques. Ces résultats renforcent le concept d’une spécialisation des hémisphères plus importante dans le cerveau humain, qui pourrait être une des raisons de la divergence entre les humains et les autres primates. La variabilité du cerveau pourrait ainsi constituer une dimension supplémentaire dans l’étude des mécanismes de l’évolution.

 

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Figure : Les aires les plus variables anatomiquement sont les mêmes aires qui se sont développées le plus tardivement sur l’arbre de l’évolution. a)  variabilité anatomique b) expansion des régions cérébrales sur l’arbre de l’évolution.
 
© Michel Thiebaut de Schotten

 

 

 

En savoir plus

  • Structural Variability Across the Primate Brain: A Cross-Species Comparison.
    Paula L. Croxson, Stephanie J. Forkel, Leonardo Cerliani, Michel Thiebaut de Schotten
    Cerebral Cortex, https://doi.org/10.1093/cercor/bhx244. Published:13 October 2017

Contact

Michel Thiebaut de Schotten
Chercheur CNRS à l'Institut des maladies neurodégénératives (CNRS / Université de Bordeaux / CEA / Inria)