Identification d’adaptations clés pour la persistance des bacilles de la tuberculose chez l’hôte

Résultats scientifiques Microbiologie

La tuberculose est une maladie infectieuse qui tue encore 1.5 millions de personne par an dans le monde. La bactérie responsable a probablement émergé d’une source environnementale par des adaptations de voies métaboliques déjà existantes. En reproduisant cette évolution en laboratoire, les chercheurs ont pu identifier des mutations du génome bactérien qui favorisent la persistance dans les poumons de l’hôte. Ces adaptations permettent à la bactérie de mieux résister à l’agression par la réponse immunitaire. La révélation de ces voies d’adaptation ouvre de nouvelles pistes de recherche dans la lutte contre cette maladie.  Les résultats de cette étude sont publiés dans la revue Nature Microbiology.

Les bacilles de la tuberculose sont associés depuis des millénaires à l’homme. Ils ont évolué pour acquérir une capacité unique à résister à la réponse immunitaire de l’hôte pour persister pendant des mois et induire des dommages tissulaires favorisant leur transmission par aérosol. Les modèles évolutifs indiquent que le bacille de la tuberculose a émergé d’une bactérie de l’environnement puis s’est répandu dans la population humaine. Quelles sont les adaptations qui ont permis à cette bactérie ancestrale de coloniser l’homme ?

Pour répondre à cette question, les scientifiques ont essayé de mimer cette transition en laboratoire. Pour cela, ils ont utilisé des souches bactériennes, nommées Mycobacterium canettii, dont les caractéristiques génomiques indiquent qu’elles pourraient être similaires à l’ancêtre de Mycobacterium tuberculosis, l’espèce responsable de la majorité des cas de tuberculose actuellement. Ces souches de M. canettii ont en particulier une capacité moindre que M. tuberculosis à persister chez l’hôte. En réalisant des cycles d’infection à partir de plusieurs souches de M. canettii, les scientifiques ont pu sélectionner des mutants qui présentent une capacité accrue de persistance chez l’hôte, proche de celle de M. tuberculosis.  Le génome de ces mutants a été analysé pour identifier les mutations responsables de cette adaptation.  L’impact de ces mutations sur la biologie des bactéries a ensuite été caractérisé pour comprendre les mécanismes ayant conduit au gain de capacité à survivre chez l’hôte. Les résultats indiquent que ces adaptations peuvent être rapidement acquises et conduisent la bactérie non pas à changer la réponse immunitaire de l’hôte mais plutôt à mieux résister aux composés toxiques qu’elle génère, en particulier l’oxyde nitrique.

L’identification de ces voies d’adaptation permet de mieux appréhender l’émergence et l’évolution d’un pathogène majeur de l’homme responsable d’infection persistante. Ces travaux ouvrent des perspectives nouvelles dans la lutte contre la tuberculose.

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© Samantha Milia, Service d’Histopathologie Expérimentale CREFRE, INSERM, Toulouse)
Figure : Lésions nécrotiques pulmonaires générées dans le modèle murin par le bacille de la tuberculose. Les coupes ont été colorées par la méthode de Ziehl-Neelsen et révèlent les bactéries en rose qui persistent au cœur de la zone nécrotique de la lésion (en bleu).

Pour en savoir plus :
Parallel in vivo experimental evolution reveals that increased stress resistance was key for the emergence of persistent tuberculosis bacilli
Aideen C. Allen, Wladimir Malaga, Cyril Gaudin, Arnaud Volle, Flavie Moreau, Ali Hassan, Catherine Astarie-Dequeker, Antonio Peixoto, Rudy Antoine, Alexandre Pawlik, Wafa Frigui, Céline Berrone, Roland Brosch, Philip Supply, and Christophe Guilhot.
Nature Microbiology. 22 juillet 2021 . doi. https://doi.org/10.1038/s41564-021-00938-4

Contact

Christophe Guilhot
Chercheur CNRS à l'Institut de pharmacologie et de biologie structurale (IPBS) (CNRS/Université de Toulouse)

laboratoire

Institut de Pharmacologie et de Biologie Structurale (IPBS) (CNRS/Université de Toulouse)
205 Route de Narbonne
31077 Toulouse Cedex 4