Grippe, COVID-19 : révélation du côté obscur des cellules dendritiques plasmacytoïdes
Dans un article publié dans Nature Immunology, des scientifiques révèlent que les cellules dendritiques plasmacytoïdes (pDCs), longtemps considérées comme essentielles pour combattre les infections virales, pourraient en réalité aggraver certaines infections respiratoires. Grâce à la génération d’un modèle de souris dépourvues de pDCs, l’équipe montre que leur absence n’affaiblit pas la défense antivirale, mais limite les formes sévères de grippe et de COVID-19.
Un rôle controversé des cellules dendritiques plasmacytoïdes
Les cellules dendritiques plasmacytoïdes (pDCs) font partie du système immunitaire inné. Elles sont spécialisées dans la production des interférons de type I et III, des molécules indispensables pour déclencher une réponse efficace contre les infections virales. Depuis leur découverte, il y a environ 25 ans, les pDCs sont donc considérées comme indispensables pour la défense contre les infections virales. Pourtant, peu d’expériences solides soutiennent cette idée. Le rôle antiviral des pDCs reste controversé, en particulier dans le cas des infections par des virus respiratoires, comme celui de la grippe ou le SARS-CoV-2, où, selon les études, les pDCs et leurs interférons ont été proposés pour être protecteurs ou au contraire nocifs.
Pour résoudre cette controverse, des scientifiques ont créé, grâce à l’ingénierie génétique, un modèle de souris dépourvues de pDCs depuis la naissance. Publiés dans la revue Nature Immunology, leurs résultats montrent que, contrairement aux attentes, ces souris se défendent aussi bien, voire mieux contre des virus comme celui de la grippe ou le SARS-CoV-2.
L’absence de pDCs n’empêche pas le contrôle de l’infection
Autrement dit, l’absence de pDCs n’empêche pas le contrôle de l’infection — elle peut même protéger contre les formes graves de ces maladies.
L’équipe a montré que cet effet néfaste des pDCs provient surtout des interférons qu’elles produisent. Ces molécules, bénéfiques en début d’infection, seraient produites par les pDCs trop tard, à un moment où le contrôle initial de la réplication du virus a déjà été pris en charge par d’autres cellules produisant des interférons plus précocement. Ainsi, ces résultats révèlent que les pDCs peuvent présenter un côté obscur lors de certaines infections virales respiratoires, car leurs interférons tardifs aggravent l’inflammation pulmonaire et les lésions dans les poumons, contribuant aux effets délétères des réponses immunitaires excessives.
« Ces résultats sont le fruit de 7 ans de travaux effectués en étroite collaboration avec d’autres équipes du CIML, et ont bénéficié de l’expertise de la plateforme marseillaise CIPHE dirigée par Ana Zarubica et appartenant à l’infrastructure de recherche Celphedia-Phenomin, membre de l’infrastructure européenne Infrafrontier » précise Elena Tomasello.
Ils ouvrent la voie à de nouvelles perspectives thérapeutiques, en particulier pour les patients souffrant de formes sévères d’infections virales respiratoires. En ciblant sélectivement les pDCs ou en bloquant leur production d’interférons, il serait possible de réduire les effets néfastes tout en préservant les mécanismes antiviraux bénéfiques.
Enfin, comme le précise Marc Dalod, « le modèle de souris mis au point permettra aussi d’étudier le rôle des pDCs dans d’autres maladies, comme les pathologies auto-immunes ou dans la réparation des tissus endommagés, domaines où ces cellules pourraient jouer un rôle délétère ou bénéfique, respectivement ».
Contact
Laboratoire
Centre d’immunologie de Marseille-Luminy - CIML (CNRS/Inserm/Aix-Marseille université)
171 avenue de Luminy,
13288 Marseille cedex 09
Résultats obtenus avec l'aide de l'infrastructure Celphedia