Comment les plantes protègent l’ADN de leurs mitochondries
Une étude parue dans The Plant Cell identifie une enzyme clé, OEX1, indispensable à la stabilité de l’ADN mitochondrial chez la plante Arabidopsis thaliana. Sans cette enzyme, le génome mitochondrial se dégrade, entraînant stérilité et anomalies chez la plante. Ces résultats ouvrent de nouvelles perspectives sur les mécanismes de maintenance des génomes des organites.
Héritage bactérien sous surveillance
Les mitochondries sont des organites cellulaires hérités d’ancêtres bactériens et souvent appelées « centrales énergétiques » de nos cellules. Elles possèdent leur propre ADN. Ce génome mitochondrial, essentiel à la respiration cellulaire, doit être maintenu intact malgré les contraintes liées à sa réplication et à son expression. Mais au fil de l’évolution, les plantes ont perdu certaines enzymes que possédaient encore les bactéries pour réparer et copier leur ADN. Pour compenser, elles ont développé d’autres protéines. Des scientifiques, dans une étude publiée dans The Plant Cell, ont découvert qu’une protéine appelée OEX1 (Organellar Exonuclease 1) joue un rôle essentiel dans cette tâche, en venant remplacer certaines fonctions perdues.
OEX1 : une gardienne du génome mitochondrial
Dans une étude menée sur Arabidopsis thaliana, une plante modèle, les scientifiques décrivent le rôle fondamental de la protéine OEX1 dans l’entretien de l’ADN mitochondrial.
Chez les plantes mutantes dépourvues d’OEX1, les scientifiques observent une accumulation d’erreurs et de réarrangements dans l’ADN mitochondrial, accompagnée de malformations végétatives et de stérilité. Ces anomalies sont liées à l’amplification incontrôlée de segments d’ADN recombiné, altérant la structure du génome mitochondrial. En conditions normales, OEX1 intervient pour éliminer rapidement les structures potentiellement délétères et participe aussi à la réparation de l’ADN.
OEX1 remplace une activité enzymatique absente des ADN polymérases organellaires végétales : celle d’une exonucléase 5’→3’ et d’une endonucléase à clapet, essentielles pour éliminer les amorces d’ARN lors de la réplication ainsi que pour résoudre les structures appelées R-loops qui apparaissent naturellement lorsque l’ADN est transcrit.
L’étude révèle également l’existence de deux isoformes d’OEX1, issues d’un épissage alternatif, mécanisme qui permet la formation de plusieurs protéines à partir d’un même gène. Ces deux isoformes ont des propriétés enzymatiques distinctes. Ces résultats laissent à penser que le rôle d’OEX1 pourrait être différent en fonction des tissus ou du stade de développement de la plante.
Un rôle clé pour la santé des plantes
En identifiant un acteur clé de la stabilité du génome mitochondrial, ce travail éclaire d’importants mécanismes de maintenance de l’ADN dans les organites. Il ouvre des pistes pour comprendre comment les cellules végétales préservent l’intégrité de ces génomes essentiels, et comment des dysfonctionnements peuvent impacter la fertilité et la croissance des plantes.

Figure : La protéine OEX1 est une nucléase impliquée dans plusieurs processus essentiels de réparation et de maintenance de l’ADN mitochondrial chez les plantes. Cette illustration montre la maturation d’un fragment d’Okazaki : OEX1 y excise la section d’ARN, tandis que l’ADN polymérase (POL1A/B) la remplace par une séquence d’ADN complémentaire.
En savoir plus : Schatz D., Le Blevenec A., Moratti F.G., Chung K.P., Mercier P., Iqbal R.K., Vallet E., Dietrich A., Bock R., Weber-Lotfi F., Gualberto J.M. R-loop control and mitochondrial genome stability require the 5'-3' exonuclease/flap endonuclease OEX1. The Plant Cell, 2025, https://doi.org/10.1093/plcell/koaf104.
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