Achille Broggi, décoder les mécanismes de l’immunité innée
Achille Broggi, chargé de recherche CNRS au Centre d’immunologie de Marseille-Luminy (CIML)1 , étudie les mécanismes comment les réponses immunitaires et plus particulièrement les interférons de type I contribuent à l’hoéostasie de l’épithélium intestinal lors d’inflammation chroniqueou d’infection. Il est récompensé par la médaille de bronze du CNRS.
- 1Unité Aix-Marseille Université/CNRS/Inserm
Pourquoi le corps humain possède-t-il plusieurs systèmes d’interférons aux effets en apparence similaires ? Après une thèse en medicine traslationelle à Milan, Achille Broggi part explorer cette question en post-doctorat à la Harvard Medical School (États-Unis). Il s’intéresse à l’interféron lambda (IFN-λ), une molécule antivirale émise lors d’une infection. Contrairement aux autres interférons, celui-ci agit localement, principalement au niveau des muqueuses. Ce détail l’intrigue : pourquoi un signal aussi ciblé, quand l’organisme dispose déjà d’une réponse antivirale globale ?
Il découvre que l’IFN-λ agit comme un modulateur : il protège les muqueuses en apaisant la réponse des neutrophiles (des globules blancs). Cependant, au cours d’infections respiratoires, il entrave aussi la réparation tissulaire si sa production se prolonge. « Nous avons montré qu’il empêche les cellules épithéliales de régénérer les lésions, ce qui favorise les infections secondaires », explique Achille Broggi. Cette tension entre défense immunitaire et réparation devient le fil rouge de ses recherches.
De retour en Europe, il installe son équipe au CIML et transpose cette question à un autre tissu clé : l’intestin. Dans des modèles de maladies inflammatoires chroniques, il montre que l’IFN-λ perturbe la régénération de la muqueuse en activant un récepteur sensoriel dans les cellules chargées de réparer la muqueuse. L’interféron pousse alors ces dernières vers la mort cellulaire. Grâce à une combinaison de modèles murins et d’organoïdes, il met en lumière ce mécanisme délétère également présent chez les patients.
Convaincu que l’étude des tissus ne peut se faire sans dialogue avec la clinique, Achille Broggi inscrit ses travaux dans une dynamique translationnelle. Il collabore pour cela avec l’hôpital Nord de Marseille et le groupe national REMIND1 pour intégrer des données de patients et affiner ses modèles. Une approche au plus près du réel, pour faire le lien entre mécanismes fondamentaux et perspectives thérapeutiques.
- 1Groupe de Recherche sur les maladies inflammatoires digestives