Louise Goupil, comprendre l’apprentissage à hauteur d’enfant
Louise Goupil, chargée de recherche CNRS au Laboratoire de psychologie et de neurocognition (LPNC)1 , étudie le développement précoce de la métacognition et la manière dont les jeunes enfants participent activement à leurs apprentissages. Elle est récompensée par la médaille de bronze du CNRS.
- 1Unité CNRS/Université Grenoble Alpes/Université Savoie Mont Blanc
Louise Goupil a toujours été curieuse. Enfant, elle posait sans relâche des questions, qu’elle qualifie aujourd’hui « d’un peu métaphysiques ». Ce goût pour l’interrogation la mène bien plus tard vers les sciences cognitives, puis vers une thèse à l’École normale supérieure de Paris. Elle y remet en cause l’idée reçue que les très jeunes enfants sont incapables de douter En observant leurs gestes ou hésitations, elle montre qu’ils ressentent l’incertitude très tôt et s’en servent pour poser des questions et apprendre.
Elle étudie pendant quelques temps l’expression vocale du doute chez l’adulte avant de revenir, lors d’un dernier post-doctorat à Londres, à sa population de prédilection. Elle s’interroge alors : comment les nourrissons manifestent-ils leurs intérêts aux adultes pour apprendre de nouveaux mots ?
Depuis son recrutement au CNRS, Louise Goupil développe une approche à la frontière entre biologie et sciences humaines et sociales. « Je m’intéresse à la façon dont les jeunes enfants participent à leurs apprentissages et co-construisent leurs savoirs avec les autres quand on leur laisse l’opportunité de le faire », explique-t-elle. Elle propose ainsi de déplacer le regard habituellement centré sur celui qui enseigne, vers celui qui apprend. Elle s’interroge aussi sur la manière dont les croyances des adultes façonnent les cadres d’apprentissage proposés aux enfants.
Pour cela, elle mobilise des méthodes mixtes mêlant observations à domicile ou en classe, entretiens avec des parents et des professionnels de la petite enfance, électroencéphalographie et expérimentations en laboratoire. Ces outils nourrissent ses trois projets actuels : sur la perception par les bébés de leur propre voix ; sur l’impact des stéréotypes « infantistes » des adultes sur leurs interactions avec les bébés ; et sur la place laissée aux questions curieuses des élèves en maternelle et au primaire en fonction de leur origine sociale.
Au-delà des résultats scientifiques, Louise Goupil nous invite à déconstruire nos idées reçues sur les capacités cognitives des plus jeunes. Car s’ils n’ont pas encore les mots, ils ont déjà beaucoup à exprimer.