Agroécologie 3 min

La composition protéique des pièces buccales du puceron mise à jour

La cuticule des insectes est un assemblage complexe de polymères alliant chitine, lipides, matrice aromatique et protéines cuticulaires. Outre leur rôle structural, ces protéines ont une fonction dans la reconnaissance des micro-organismes. Le travail publié dans la revue iScience par des chercheurs du CNRS et d’INRAE déchiffre pour la première fois la composition protéique de la cuticule des pièces buccales d’un insecte qui porte les récepteurs de nombreux virus végétaux. Sa composition s’avère complexe et l’étude a permis d’identifier une nouvelle catégorie de protéines cuticulaires, sans motif d’accrochage à la chitine. Il s’agit d’une étape clef dans la compréhension des structures cuticulaires, base de la diversité morphologique des arthropodes.

Publié le 10 février 2020

illustration La composition protéique des pièces buccales du puceron mise à jour
© INRAE

Le stylet, un matériau composite complexe

Les insectes ont développé des cuticules de formes et de fonctions souvent extraordinaires ou intrigantes, parfois très spécifiques, qui comprennent par exemple des microstructures régissant leurs interactions avec les microbes qu’ils transmettent. C’est en particulier le cas dans les pièces buccales des insectes piqueurs comme les pucerons, qui hébergent des récepteurs de virus au sein d’une microstructure appelée acrostyle. Les chercheurs dévoilent dans cette étude la première analyse transcriptomique profonde d'une glande secrétant une cuticule de pièces buccales d’insectes (l’organe « Retort » ou «organe de la cornue» des pucerons, rassemblant les glandes précurseurs des stylets).

Cette analyse définit les stylets comme un matériau composite complexe. En comparaison, les élytres de coléoptères, l’une des rares cuticules analysées par des techniques génomiques quantitatives comparables, sont composées d’une poignée de protéines majeures (moins de 6, contre plus de 60 pour les stylets), donc de composition bien moins complexe que ces derniers. Ces deux cuticules ont des caractéristiques physiques très différentes (en termes de rigidité, de solidité, etc…), et s’avèrent de composition fort distincte.

Etudier les stylets pour mieux comprendre la transmission des virus

Le transcriptome de cet organe a également permis aux chercheurs de proposer une définition algorithmique pour une nouvelle famille de protéines cuticulaires (CP) caractérisée par une faible complexité et une composition en acides aminés fortement biaisée, particulièrement riche en tyrosine ou en histidine pour deux sous-classes d’entre elles. Il semblerait que ces protéines soient codées dans tous les génomes d’insectes, en faisant une nouvelle classe d’importance numérique à peu près égale aux autres classes qui étaient connues jusqu’ici. 

Enfin, les chercheurs ont identifié un gène différentiellement exprimé entre les deux types de glandes de cet organe, les glandes maxillaires et mandibulaires. Ce gène code pour un précurseur d’un neuropeptide de type pyrokinine (PK), qui caractérise les glandes mandibulaires. L'injection dans les pucerons d’un mélange des trois peptides synthétiques prédits PK1/2/3, un jour avant l'ecdysie (épisode de la mue définissant le décollement de l’ancienne cuticule), provoque un phénotype létal et spécifique causant une formation altérée de la tête, quasi absente chez certains des pucerons traités.

Cette étude fournit la description la plus complète à ce jour de la composition protéique des stylets de pucerons. Elle devrait améliorer la compréhension de la transmission des virus non-persistants, les plus nuisibles en situation agronomique, qui s’attachent et se détachent des stylets durant la transmission. Les gènes et protéines candidats identifiés vont pouvoir être triés un à un par immunocytochimie (marquages par anticorps spécifiques) pour leur affleurement dans la zone de l’acrostyle. Ils sont alors définis comme stylines, et leur rôle dans la transmission virale peut être testé pour acquérir le statut de récepteur viral : ils seraient alors les premiers récepteurs viraux formellement identifiés...

Référence
Guschinskaya et al.2020, iScience https://www.cell.com/iscience/fulltext/S2589-0042(20)30011-0
Webster et al. 2018, J. Virol. 92(14) : e00432-18. doi : 10.1128/JVI.00432-18

 

Yvan RAHBÉ

Contacts

Yvan RAHBÉ Biologie et Génétique des Interactions Plante-Parasite (BGPI)

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